Les échappées belles de M. Buzon
L’atelier d’Edouard Buzon dans les Yvelines est un havre de paix dans lequel cet artiste autodidacte peut s’adonner entièrement à ce qui est devenu, à force d’apprentissage solitaire, un métier : la peinture. Avec simplicité et gentillesse, Edouard nous a ouvert sa boîte de Pandore. Pour le meilleur exclusivement.
Depuis des années maintenant, ce jeune peintre s’attèle, avec patience et opiniâtreté, à son ouvrage, pour obtenir en fin de course des œuvres sur bois ou aluminium, au fini semblable à une laque chinoise. Attenant à la maison, l’atelier a été bâti pour épouser idéalement les exigences de ce labeur.
Pouvez-vous nous parler de cet espace compartimenté ?
Edouard Buzon : Il y a d’abord l’atelier, à proprement parler, dans lequel se trouvent les images en cours, mes recherches, mes tentatives multiples. La petite pièce adjacente est l’espace dédié au séchage de mes travaux en phase d’achèvement, totalement à l’abri des poussières assassines. Enfin au-dessus,la mezzanine me tient lieu de bureau, d’espace de réflexion. C’est aussi là que j’entrepose les travaux prêts à être envoyés dans différentes galeries ou chez des particuliers. Cela peut sembler fastueux mais le fini impeccable des œuvres de Buzon justifie pleinement l’existence de ces espaces. Ne nous laissons pas berner : la méticulosité d’Edouard n’entache en rien sa créativité. Dans le monde réenchanté de Buzon, la photographie est omniprésente, et néanmoins anecdotique. Elle n’est que prétexte à une errance poétique.
Quel rapport entretenez-vous avec la photographie ?
Edouard Buzon : J’adore la photo, elle m’a toujours passionné. Mais ce n’est pas mon médium. J’ai besoin de m’approprier les choses, les images et de le faire avec mes mains, armé des couleurs que je fabrique moi-même à partir de pigments. La photo n’est qu’une étape dans mon travail. J’organise des rencontres improbables entre des éléments visuels qui ne pourraient pas se croiser dans la vraie vie, et je les intègre dans des paysages plus abstraits orchestrés par des aplats de peinture. Quant aux humains et aux animaux, ils se présentent toujours de dos afin que celui qui regarde ait toute liberté pour identifier ces créatures.
Y a-t-il des lieux qui vous ont particulièrement inspiré ?
Edouard Buzon : Oui bien sûr. Barcelone, par exemple, est un endroit qui me fascine pour son mélange des genres. J’ai beaucoup photographié le quartier du port olympique. Ce que je faisais depuis longtemps avec mes montages, je l’ai découvert là-bas à l’état brut. Cela va dans le sens de ma démarche : un palmier, synonyme de soleil, de vacances, qui côtoie une grosse usine, c’est dingue ! Parfois la réalité dépasse ma fiction : à Coney Island, je me suis trouvé nez à nez avec de faux palmiers au tronc de métal. Paradoxe ! Evidemment j’ai succombé au charme suranné et glauque de cette vieille fête foraine des 70’s. C’est un des endroits qui m’a beaucoup marqué, un
lieu alternatif.
Alternatif… Voilà donc la proposition faite par Edouard Buzon à celui qui pose le regard sur son travail : une alternative au réel, un paysage apparemment familier ponctué de présences mystérieuses et improbables, une déambulation faite de signes, de chiffres, de morceaux de phrases inachevées, une échappée belle au-delà des apparences.
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